Dès le 10ème siècle, au temps du grand prince évêque de Liège, Notger, le domaine fait partie de la mense épiscopale et englobe une vaste forêt, des terrains, des carrières et des marais.
A l'abbaye de Cîteaux, une tablette fait mention des années de fondation de chaque monastère de l'ordre cistercien, L'abbaye du Val Saint Lambert est mentionnée à 1187.
Début 13e siècle, des disciples de Saint Bernard quittèrent l'Abbaye de Rosières pour venir s'installer aux confins de la commune de Seraing à un endroit appelé «champs des Maures», terrains offerts par le prince évêque Hugues de Pierrepont.
Bâtisseurs infatigables les moines assainissent le terrain, canalisent les ruisseaux, créent des étangs, assèchent les marais ... L’exploitation florissante des houillères par les cisterciens, ajoutée à des dons généreux, va leur permettre d’édifier rapidement une église et des bâtiments monastiques.
Les bâtiments sont de style gothique dont les Cisterciens ont contribué à répandre l’usage. Ils s’ordonnent autour du cloître à ciel ouvert, entouré de galeries. L’église s’allonge sur un côté, son chevet est orienté à l’Est.
A partir de la moitié du 16ème, la prospérité revient. Les pèlerins se font de plus en plus nombreux.
En 1629, un bâtiment, nommé «la Maison des Etrangers» et destiné à l’accueil des hôtes de l’abbaye, est construit dans un style caractéristique de l’architecture mosane liégeoise.
C’est au 18ème siècle, que la destruction partielle des bâtiments incite l’abbé de Harlez (1748 -1779) à entreprendre, à partir de 1751, la construction d’une nouvelle abbaye, le Château actuel, après avoir fait démolir l’église gothique et le cloître, hormis son aile orientale (l'abbaye actuelle).
L’abbaye est mise aux enchères le 10 juillet 1797. Trois mois à peine après l’évacuation du dernier abbé. C’est le citoyen Deneef qui en fait l’acquisition. Il détruit l’église abbatiale et transforme les bâtiments pour en faire une filature de lin qui n’aura pas de succès.
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Un peu plus tard, après la chute de l’Empire, la prestigieuse cristallerie de Vonêche, près de Beauraing, se retrouve en territoire hollandais et donc coupée du marché français. Aimé Gabriel d’Artigues qui la dirige rachète alors la cristallerie de Baccarat dans les Vosges. Deux de ses collaborateurs à Vonêche font dissidence, le chimiste Kemlin et le polytechnicien Lelièvre, qui créent leur propre cristallerie dans l’abbaye du Val Saint-Lambert.
L’endroit est idéal : la Meuse et la grand-route sont proches, les espaces sont grands, et on trouve aux alentours toutes les matières premières, énergétiques et une main-d’œuvre de qualité.
Au cours de près de 600 ans d’existence (1200 – 1800), le site du Val Saint-Lambert a connu des difficultés, des pillages et autres vicissitudes, deux incendies (1468 et 1517) mais aussi une prospérité qui est allée croissante à partir du milieu du 16ème siècle.
Dès Juin 1826, des fumées s’élèvent du plus vieux bâtiment de l’abbaye : le premier four de la cristallerie est activé. Le palais abbatial accueille les bureaux et les appartements des cadres et la salle d'exposition. L’aile orientale, dernier vestige du cloître gothique, est percée pour permettre le passage d’une voie ferrée interne, elle sert d'atelier.
La cristallerie se développe rapidement et, à partir de 1835, autour de la cour du Val, une centaine de logements sont construits pour les travailleurs. A la fin du siècle, la cristallerie grandit toujours. La production s’est diversifiée.
On ira jusqu’à produire plus de 160.000 pièces par jour avec près de 5000 ouvriers à l’aube du 20ème siècle. C’est une véritable petite ville qui se forme autour de l’usine, toujours animée.
En 1926, la cristallerie est à son apogée. Le crash boursier et la 2ème guerre mondiale mettent un frein à son expansion.
Un autre bâtiment est présent sur le site : la Maison "Deprez" qui abrite le restaurant La Manufacture, demeure occupée de 1863 à 1889 par le grand directeur Jules Deprez qui fut un des artisans de l'essor de la cristallerie.
Le château, nouveau palais abbatial du 18ème siècle, a remplacé le cloître gothique du 13ème siècle; il est aujourd’hui un magnifique outil touristique. Il aura souvent été remanié lors de ces deux derniers siècles et sera longtemps occupé par la Société des Cristalleries du Val Saint-Lambert (dès 1826) avant de devenir propriété de la Ville de Seraing dans les années 1980, c'est un véritable fleuron du patrimoine architectural sérésien.
Il a subi, le 14 mars 2006, un terrible incendie de l'ensemble de sa toiture classée. Il est actuellement en cours de restauration.
L’entièreté du site a été réaménagée selon les principes de la «Charte de Venise» c'est-à-dire la chartre internationale sur la conservation et la restauration des monuments et des sites.
Les travaux entrepris au château depuis 1997 auront engagé des fonds importants provenant de la Région Wallonne, de l’Union Européenne dans le cadre du FEDER, de la Commune de Seraing et de la Province de Liège. Ces fonds ont été dédiés à la restauration du bâtiment ainsi qu’à l’aménagement touristique.
Il faut se réjouir de ces démarches à la fois respectueuses du passé et soucieuses de notre avenir. Elles se réalisent de plus dans un site porteur d’une part importante de notre mémoire collective. Ce site doit continuer à vivre, à évoluer, à s’épanouir.